Une lente montée, entrecoupée de pauses, autant pour admirer le paysage (se laisser ravir), que pour récupérer des forces (convertir le repos en énergie).

Traverser des passes étroites, de lourds paquets sur le dos, toutes ses possessions en fait. De lourds manteaux, enfilés les uns sur les autres. Des bottes rendues humides par la marche dans la neige, les vêtements de corps collés à la peau par la sueur. Mélange des sensations: entre le froid externe et la chaleur du mouvement. Convertir cette différence de température en énergie, mais comment?
Faire d’étranges rencontres en cours de route. Une meute de loups, attirée par la nourriture. Un vieil ermite, fou de solitude, redevenu sauvage à force de ne rencontrer personne. D’autres familles déplacées, réfugiés anonymes, désirant demeurer invisibles.
Et dans le ciel, les astres reprennent ces mouvances glacées; faibles échos ou guides célestes? Lever la tête en montagne, et toucher les étoiles pour mieux les interroger. Âmes des disparus, avez-vous trouvé refuge là-haut? Ou bien toutes ces lumières ne sont que des objets quantiques en réaction les uns aux autres?

Tendre la main et gravir le ciel jusqu’à sortir de Terre, jusqu’à s’extirper du monde. Escalader sans effort toute l’atmosphère. Être aspirée par cette matière étrange, innommable, qui sépare les étoiles et les galaxies. Habiter Saturne, entrer au coeur de sa substance volatile mais dense et redescendre. Retrouver ce corps qui reprend son souffle. Mais en même temps demeurer là, écartelée entre deux mondes, et ne plus savoir.